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«Zombie Music.»

Avec François Bensignor, écrivain et journaliste spécialiste des Musiques du monde.

Pour avoir chanté “Zombie”, Fela Anikulapo Kuti a vu sa maison brûler, tous ses biens détruits, ses femmes et musiciens molestés, sa mère âgée défenestrée… Telle était la réponse de la junte dirigeant le Nigeria à l’affront de ses paroles, qui décrivaient les militaires comme des zombies qu’elle manipulait. Le mot zombie est hérité des anciens peuples Kongos d’Afrique Centrale, comme beaucoup de rythmes générateurs de genres musicaux partis du Nouveau Monde : samba, rumba, tango, compas, salsa, reggae, tant d’autres. Les mélanges entre cultures traditionnelles kongos et cultures issues du Golfe du Bénin ont irrigué les religions syncrétiques d’Haïti, de Cuba ou du Brésil. Issues de ces pratiques communautaires où prévalent rythmes, chants et danses, ces nouvelles musiques ont fait florès, séduisant quasiment tous les peuples du monde. S’y est mêlé le mythe du zombie, largement adopté par les descendants d’esclavagistes blancs, notamment dans la pop et surtout dans le rock métal. Ces derniers tentent-ils d’exorciser de vieux démons ?…

Aujourd’hui, la musique populaire, devenue un phénomène global, conserve les stigmates d’une racialisation outrancière induite par la traite des Africains. La peur de l’autre continue d’alimenter le mépris patent ou secret de certaines populations occidentales vis à vis des Afro-descendants. Pourtant leur contribution a fait évoluer considérablement l’art de la musique depuis le XXe siècle. Si d’aucuns ne veulent voir en eux que des zombies décérébrés, leurs réalisations culturelles montrent qu’ils possèdent bien plus qu’un cerveau, une âme humaine agile et créative.

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