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RÉSERVATIONS CONSEILLÉES

 resapopphilo@gmail.com

Le mot d’Edgar Morin 

Philosophe, sociologue et penseur de la complexité

Éloge de la complexité

 

Nous vivons dans un monde où se multiplient les crises écologiques, sociales, politiques, technologiques. Ces crises ne s’additionnent pas seulement : elles s’entrecroisent, se renforcent, se nourrissent mutuellement. Elles composent un tissu de relations, de rétroactions, de contradictions, d’incertitudes. Or, bien souvent, le réflexe est d’y répondre par le simplisme, en tentant de réduire les problèmes à une seule cause, en sacrifiant les nuances et les doutes sur l’autel de la promesse d’une solution unique et unitaire.

Depuis mes premiers travaux, j’ai pressenti la nécessité d’une pensée qui sache se mesurer à la complexité. J’ai nommé cette exigence « la pensée complexe ». Elle n’est pas une doctrine, mais une attitude, une démarche de reliance. Il ne s’agit pas d’expliquer le monde par un système clos, mais de tisser des liens entre disciplines, de reconnaître les antagonismes, d’accueillir et de célébrer l’ouverture. Ce souci n’a cessé de m’accompagner tout au long de ma vie intellectuelle : non pas dompter la complexité, mais apprendre à dialoguer avec elle, à l’habiter. La Semaine de la « pop philosophie », que Jacques Serrano a inventée et fait grandir, me touche personnellement. Moi-même, j’ai tenté de penser les rumeurs, les modes, les musiques populaires, les stars, toutes ces expressions d’un esprit du temps que la philosophie et la sociologie ne doivent pas mépriser. La culture populaire nous enseigne qu’une idée puissante peut naître d’une chanson, d’un film, d’un fait divers. Au fond, la pensée est toujours « pop » lorsqu’elle s’incarne dans la vie et dans l’émotion de l’événement. Faire aujourd’hui un éloge de la complexité a toutefois quelque chose de déroutant. Comment louer ce qui, par essence, échappe et résiste aux clôtures ? Comme Érasme, en son temps, osa composer un Éloge de la folie pour rappeler que la sagesse humaine ne se réduit pas à la raison calculatrice, il nous revient certainement d’oser proclamer un Éloge de la complexité. Mais une lucidité s’impose : le mot complexité, absorbé par le discours médiatique et managérial, court le risque d’être aujourd’hui galvaudé. Dès lors, l’enjeu n’est plus seulement de proclamer la complexité, mais de la réinventer, de la faire vivre au-delà des slogans, comme une pratique du penser et du vivre.  C’est pourquoi je ne conçois pas cette édition de la Semaine de la Pop Philosophie comme un éloge pour l’éloge, encore moins comme un hommage à ma personne, mais comme une affirmation collective : celle de passer à la complexité en actes, en la faisant dialoguer avec le public, en la confrontant aux urgences de notre siècle, en reliant savoirs et expériences. Je vois dans ce festival un lieu privilégié où la pensée se fait accessible, joyeuse et fraîche, où se rencontrent philosophie, art, science et société dans une Marseille elle-même traversée par tant de flux et de métissages. Puisque nous savons désormais que l’incertitude est notre condition, faisons de la complexité non pas un obstacle, mais une boussole. Ce festival en témoigne : peut-être sommes-nous déjà entrés dans l’ère d’une certaine « post-complexité », où la complexité doit être repensée, revitalisée. Proclamer ne suffit plus, il nous faut agir ; en nous délestant des voiles de l’ignorance, mettre les voiles ; et solidement amarrés aux principes de la pensée complexe, larguer les amarres.

Programme de la Saison XVII

samedi 11 octobre : 19h

Soirée d’ouverture

COMPLET

Sanatorium hélio-marin Jean Martin
« Le référendum en question »

Rencontre avec Michel Wieviorka, sociologue, Magali Della Sudda, sociologue, et Antoine Chollet, théoricien politique, en conversation avec Rémi Baille, écrivain, membre du comité de rédaction de la revue Esprit.

Lors de cette soirée inaugurale en partenariat avec la revue Esprit et l'AP-HM, la Semaine de la Pop Philosophie présente « Le référendum en question ». Lorsqu’il est convoqué sans nuance ni pédagogie, le référendum devient moins un outil d’expression raisonnée qu’un exutoire émotionnel : un vote d’humeur, souvent déconnecté de l’enjeu réel, parfois guidé par le ressentiment envers les institutions ou les élites. Ce que l’on présente comme une volonté de « faire parler le peuple » peut alors se muer en une opération de dépolitisation du débat. À force de simplifier des problématiques fondamentalement complexes — juridiques, économiques, écologiques ou éthiques — on risque non seulement de fausser la compréhension des enjeux, mais aussi d’effacer les conditions mêmes du débat démocratique : l’échange d’arguments, la délibération, la reconnaissance des incertitudes. Magali Della Sudda, sociologue, Michel Wieviorka, sociologue, et Antoine Chollet, théoricien politique, sont invités à nous proposer chacune et chacun leur réflexion sur cette question qui, en France, ne laisse personne indifférent. Ils sont interrogés par l'écrivain Rémi Baille, membre du comité de rédaction de la revue Esprit et animateur du groupe Esprit-Marseille.

dimanche 12 octobre : 16h

Cinéma L’Alhambra
« Chronique d’un été »

Projection du film Chronique d’un été (1961) (86min) réalisé par Edgar Morin et Jean Rouch. Suivi d’un échange avec Olivier Bohler, réalisateur du film Edgar Morin, chroniques d’un regard (2015)

Tourné dans les rues de Paris pendant la douloureuse crise de décolonisation de l'Algérie, ce film est largement improvisé. Les personnages sont créés au cours du tournage sur la base d'une simple question : "Êtes-vous heureux ?" Montrant les rushes aux participants, Jean Rouch et Edgar Morin les invitent à approfondir leur propos. Film pionnier du cinéma-vérité, baptisé cinéma direct outre-Atlantique, Chronique d'un été a été réalisé en 1960 par le sociologue Edgar Morin et le cinéaste Jean Rouch. Chronique, derrière sa spontanéité, est un film-manifeste qui emprunte beaucoup à la pensée du sociologue. Depuis plusieurs années déjà, Morin s'intéresse au cinéma et à son importance dans le champ des sciences sociales. Il a publié plusieurs ouvrages et s'explique dans un article intitulé « Pour un nouveau cinéma-vérité » (France-Observateur n°506, 14 janvier 1960), il y pose les bases des principes qui vont inspirer le projet de Chronique, en se référant au concept de "Kino-Pravda" théorisé par Dziga Vertov. Le cinéma, pour lui, c'est d'utiliser une caméra pour rapprocher les hommes et pour rapprocher le filmeur du filmé : "La recherche du nouveau cinéma-vérité est du même coup celle d'un cinéma de la fraternité". Celles et ceux qui sont filmés se servent de la caméra pour exprimer leur "vérité profonde". La question centrale du film, le bonheur, est sensiblement marquée par le contexte politique anxiogène de la guerre d'Algérie, qui a de fortes répercussions sur le territoire national. Les deux réalisateurs ont plus particulièrement cherché à mesurer la résistance de la jeunesse d'une grande ville, étudiants, artistes, employés et ouvriers mêlés, à un climat national et international plutôt morose. (Les Yeux docs)

lundi 13 octobre : 16h

Archives et Bibliothèque Départementales Gaston Defferre
« Quand la vérité
ne triomphe plus :
comment déjouer
la mécanique des
fausses croyances ? »

Rencontre avec Séverine

Falkowicz, maître de

conférence en psychologie

sociale, et Alexander Samuel,

docteur en biologie, suivi

d’un échange avec une

journaliste de la Provence​.

Comment démêler le vrai du faux, face au flux constant d'informations auquel nous sommes confrontés ? Fake news, théories du complot, désinformation, conseils bien intentionnés du voisin… De fausses croyances s'immiscent dans nos jugements et portent atteinte à nos libertés, de l’adoption d’attitudes ou de comportements contraires à nos intérêts (valeurs, objectifs, etc.) jusqu’à l’adhésion, parfois, à des idées conspirationnistes. Sur la base de la psychologie sociale, nous pouvons cependant définir de “bonnes pratiques” afin de développer notre esprit critique et de mieux communiquer avec les autres : des outils concrets seront présentés afin de trier au mieux l’information et d’éviter les pièges et manipulations. Au-delà de cette autodéfense intellectuelle, nous évoquerons les éléments de contexte impliqués dans les processus d’influence sociale. Pour aller plus loin : 1/Au cœur de l’esprit critique (Falkowicz et al., 2023) 2/Complotisme et Manipulation (Falkowicz, Samuel et al., 2025).

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Archives et Bibliothèque Départementales Gaston Defferre
« Introduction à la complexité du monde contemporain »
une proposition de la Fondation Edgar Morin

Séminaire de lecture,

présenté par Fausto Fraisopi,

philosophe, Christopher

Yggdre, directeur délégué de

la Fondation Edgar Morin, et

Jean-Marc Loubet, assistant

d’Edgar Morin et secrétaire

général adjoint de la

Fondation Edgar Morin.

La pensée complexe est de nos jours l’outil nécessaire pour s’orienter et agir dans un monde multidimensionnel, dont les événements globaux nous demandent de reconfigurer nos approches et nos stratégies. Cela n’advient pas seulement par la conception de divers scénarios, d’horizons de possibles, mais par une compréhension plus profonde, fondamentale, de la nature des phénomènes complexes à toute échelle. Par la lecture et l’actualisation du livre d’Edgar Morin, Introduction à la pensée complexe, il s’agit, ensemble, de développer des outils de compréhension et d’action pour s’orienter et agir dans un monde multidimensionnel.

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Archives et Bibliothèque Départementales Gaston Defferre
« De quoi les fake news sont-elles le nom ? »

Conférence de Julien Giry,

politiste, suivi d’un échange

avec une journaliste de la

Provence.

"Désignée « mot de l’année 2017 » par le dictionnaire Collins, la formule fake news, notamment en raison des usages qui en sont faits par le président Trump, n’en finit pas d’alimenter les débats au sein des sciences sociales. S’agit-il d’un fait nouveau ou d’un simple mot-valise à la mode recouvrant d’autres phénomènes mieux connus et étudiés tels que les rumeurs, les théories du complot, la propagande ou la désinformation ? En d’autres termes, l’expression fake news est-elle un concept opératoire pour les sciences sociales ? Partant de cette interrogation, cette communication entend procéder à un effort de cadrage autour de cette formule afin d’en faire une catégorie et un outil analytiques d’un fait social relativement autonome dans la mesure où, outre sa dimension profondément info-communicationnelle, elle se situe au carrefour des différentes notions citées précédemment, sans toutefois les recouper pleinement".

mardi 14 octobre : 19h30

Cité de la Musique
Intelligence artificielle, musique, et complexité : suis-moi, je te fuis, fuis-moi, je te suis...

Rencontre avec Pierre Saint-Germier, philosophe et chargé de recherches à l’Ircam, Jean-Louis Giavitto, informaticien et directeur de recherches à l’Ircam, et Sylvain Bourmeau, directeur et fondateur de la revue AOC.

Selon une opinion souvent relayée et en partie étayée par des études quantitatives, les musiques populaires seraient caractérisées, depuis la seconde moitié du XXe siècle, par une complexité décroissante. Il existe en outre un lien étroit entre la question de la complexité musicale est celle de l’automatisation de la création musicale, que viennent renouveler les dernières avancées dans le domaine de l’apprentissage profond. Alors que le recours à des algorithmes avait permis dans la deuxième partie du XXe siècle de sculpter de nouvelles complexités musicales, l’IA générative qui envahit désormais les plateformes d’écoute en ligne pourrait conduire à un nivellement par le bas de la diversité et de la complexité musicale, si l’on prend au sérieux la possibilité de boucles de rétroactions auto-alimentées (lorsque des musiques générées par IA servent à entraîner les nouvelles versions des modèles génératifs). Dans une optique de clarification, cette présentation reviendra sur les différentes manières de définir et d’évaluer la complexité musicale dans les musiques savantes et populaires, à l’aune des dernières évolutions de l’IA.

mercredi 15 octobre : 18h 

Bibliothèque Alcazar
Où va l’humanité ?

Conférence de Marc Halévy, physicien et philosophe. Suivi d’un échange avec Jean-François Dortier, fondateur de la revue Sciences Humaines, rédacteur en chef et fondateur du magazine L’Humanologue.

En réponse à l'effondrement des sciences "mécanicistes" dites "modernes" (nées à la Renaissance et en plein chaos aujourd'hui), il faut clairement affirmer que le cosmos n'est pas une mécanique : •il est un organisme unique, unitaire et unitif (une Unité effective atemporelle), globalement Vivant et totalement irréversible ; •qui est doté d'un projet d'accomplissement de lui-même (son Intentionnalité) et qui, pour ce faire, génère des processus étagés en "poupées russes" intriquées ; •qui s'engendre des ressources (une Substantialité) dont tout procède et qui s'exprime en termes de prématière ondulatoire, de protomatière particulaire de la matière tangible ; •et qui se donne de lois, règles et normes (sa Logicité) afin de dissiper optimalement les tensions produites par les multiples bipolarités qui la composent ; •in fine, cette Unité, cette Intentionnalité, cette Substantialité et cette Logicité convergent vers un processus cosmique de Constructivité : construire l'accomplissement du Tout en passant par une multitude d'accomplissements partiels, momentanés et locaux. Tout ce qui existe est un processus particulier émergeant du processus cosmique et destiné à contribuer optimalement à l'accomplissement de celui-ci.

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Bibliothèque Alcazar
La philosophie et la haine de la démocratie

Conférence de Barbara Stiegler, philosophe. Suivi d’un échange avec Jean-François Dortier, fondateur de la revue Sciences Humaines, rédacteur en chef et fondateur du magazine L’Humanologue.

Nous sommes dans une situation paradoxale. Partout et en tout temps, nous nous proclamons tous démocrates. Mais si on s’arrête un instant pour réfléchir au sens de ce mot, le scepticisme soudain nous envahit. Le peuple qui serait au pouvoir ? Vraiment? Le pays n’est-il pas trop grand ? Les passions de la foule trop dangereuses? Les questions du monde trop complexes ? Le peuple n’est-il pas le plus dangereux des tyrans ? Toute notre tradition de pensée, venue de Platon, adversaire résolu de la démocratie, et aussi d’Aristote qui ne croyait qu’au régime mixte pour conjurer la domination des pauvres, en passant par les tenants libéraux du « gouvernement représentatif » alimente notre démophobie, nous enfermant dans une authentique névrose. Brandissant sans cesse la démocratie en étendard, sourdement nous la craignons, comme le plus dangereux des régimes. Une fois ce diagnostic posé, quel chemin emprunter ensemble ? Faut-il renoncer à la démocratie ou espérer qu’elle advienne ? Cette dernière hypothèse implique une autre condition: celle d’une transformation profonde de la philosophie.

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Bibliothèque Alcazar
Du plat de spaghetti à l’économie : la complexité du monde

Conférence de Pablo Jensen, physicien. Suivi d’un échange avec Jean-François Dortier, fondateur de la revue Sciences Humaines, rédacteur en chef et fondateur du magazine L’Humanologue.

Pour nombre de physiciens, un système est complexe quand un grand nombre d'éléments interagissent sans coordination centrale et mènent spontanément à l'émergence de structures stables. En somme, quand des spaghettis s’enchevêtrent spontanément pour former ce tas complexe sur nos assiettes… Cette définition résonne étrangement avec la vision de l'économie proposée par le libéralisme. Celui-ci la conçoit comme le produit spontané des actions individuelles, dont la complexité résultante dépasse notre entendement, et dont il faudrait déléguer la gouvernance aux marchés. Mais notre société est-elle vraiment un système complexe ?

mercredi 15 octobre : 19h30

Villa Bagatelle –
Mairie du 6e/8e
L’antisémitisme, un meurtre de la responsabilité

Rencontre avec Brigitte Stora, essayiste et docteure en psychanalyse. Suivi d’un échange avec Alexis Noussprofesseur émérite de littérature générale et comparée à l’AMU

Malgré la Shoah, le discours antisémite qui l’avait permis, n’a pas changé : les Juifs, peuple coupable, tout entier situé du côté de la domination, du privilège et de la spoliation, se seraient approprié l’avenir du monde. L’antisémitisme, d’où qu’il vienne, proclame l’urgence de déloger les Juifs d’une place imméritée, d’une « élection » usurpée … Comment ne pas reconnaître l’imaginaire ancestral de ce discours délirant qui de nouveau se parle un peu partout, et, c’est le plus terrible, parfois même à l’insu de ses locuteurs. Pourquoi un si petit groupe humain demeure-t-il l’obsession de centaines de millions d’individus ? Que peut bien signifier cette « conspiration juive pour dominer le monde », ce terrifiant empire que les Juifs exercent sur les antisémites ? L’antisémitisme est d’abord une très ancienne vision du monde qui postule l’abolition du judaïsme comme condition d’une rédemption universelle. Mais il est aussi une rage intime contre les Juifs qui, dès lors, occupent la place originelle de l’altérité fondamentale. Cet Autre, tout Autre qui nous oblige et nous grandit ou qui nous menace. Le refus du nom de l’autre, de toute dette à son égard et la hantise du désir qu’il peut susciter sont au cœur du discours antisémite. Ils apparaissent comme un modèle universel du refus de l’altérité en soi. Comme un meurtre de la responsabilité et de l’émancipation. Franz Fanon avait prévenu : « Quand vous entendez dire du mal des juifs, dressez l'oreille, on parle de vous ».

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Villa Bagatelle –
Mairie du 6e/8e
La notion de race dans l’espèce humaine a-t-elle un sens en biologie ?

Conférence de Bernard Binétruy, directeur de recherche émérite Inserm.

A l’heure où la résurgence sur le devant de la scène médiatique d’idéologies ouvertement racistes a ravivé le débat très ancien sur les fondements biologiques de la notion de race et sur sa validité pour l’espèce humaine, le séquençage complet du génome humain apporte des réponses scientifiques claires, objectives et définitives sur ce sujet. Alors que chez les animaux domestiques la notion de race prend tout son sens, les croisements consanguins permettant la sélection de caractères distinctifs transmissibles, dans le cas d’Homo sapiens, et ce dès le milieu du XXème siècle, les scientifiques reconnaissent unanimement l’impossibilité de subdiviser l’espèce humaine en races distinctes. Avec les premiers séquençages en 2003 de génomes entiers humains, les comparaisons interindividuelles ont documenté, et précisé chaque jour un peu plus, la grande homogénéité génétique de l’espèce humaine, fournissant des arguments intangibles sur le sujet. Même si, au fil du temps, les peuplements géographiques distincts ont engendré des signatures génétiques particulières, les mélanges de populations au cours des générations successives ont abouti à des brassages génétiques répétés. Les signatures génétiques d’origines géographiques se retrouvent ainsi en proportions variables au sein du génome de chaque individu. A ce jour, aucune lignée génétiquement isolée n’a pu être mise en évidence chez l’homme, démontrant que la notion de race dans l’espèce humaine n’a pas de sens biologique.

jeudi 16 octobre : 18h30

Mucem
La complexité : un "pharmakon" face à l'urgence démocratique ?

Conférence-performance

d’Ousama Bouiss,

enseignant et chercheur en

intelligence démocratique

à CY Ecole de Design et au

Terra Institute.

Suivi de la projection

d’extraits d’entretiens avec

Edgar Morin issus du film

Homo Indisciplinatus d’Abdel

Aouacheria.

Parfois, lorsque la solidité du sol sur lequel nous pensions marcher semble s'ébranler, nous invoquons quelques concepts implacables (liberté, démocratie, justice...) pour dénoncer quelques maux inévitables (fascisme, autoritarisme, populisme...). Ainsi en est-il du concept de "complexité". Au mythe simpliste d'une identité nationale, nous rappelons la complexité de l'histoire qui forme les nations. "Nous", les amis de la démocratie. Au fantasme raciste d'une altérité coupable, nous rappelons la complexité anthropologique qui forme l'humanité. Vous, les esprits simples, simplets, simplificateurs : vous niez la complexité du Réel pour mieux autoriser la simplicité de votre violence ! Et pourtant... "Les pierres sont dures, l'eau est humide et les objets qu'on lâche tombent vers le centre de la Terre". Ainsi, face à ce "Parti qui vous disait de rejeter le témoignage de vos yeux et de vos oreilles", Orwell nous indique qu'"il fallait défendre l’évident, le bêta et le vrai. Les truismes sont vrais, cramponne-toi à cela. Le monde matériel existe, ses lois ne changent pas". Et si, pour défendre l'idéal démocratique, il nous fallait rappeler la simplicité grotesque du sol qui le fonde plutôt que la complexité des chemins qui y mènent ou qu'il permet de construire ?

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Mucem
Le courage de la nuance

Conférence de Jean Birnbaum, critique littéraire et essayiste, directeur de publication du Monde des Livres, supplément hebdomadaire du journal Le Monde.

Dans une fiction au titre aussi provocateur qu’intrigant « Pierre Ménard auteur du Quichotte », Borges met en scène un poétaillon symboliste du début du XXème siècle qui consacra l’essentiel de sa vie littéraire à écrire « Don Quichotte ». Entendons bien : à l’écrire, pas à le recopier ou à le plagier ; pas non plus à écrire un « Quichotte » contemporain. Pierre Ménard n’a que mépris pour ces ouvrages « parasitaires qui situent Hamlet sur la Canebière ou Don Quichotte à Wall Street ». À partir de cette « entreprise a priori impossible » cette fable permet de poser au phénomène de la création ou de l’invention, la question de la méthode et d’exposer la complexité des causes que son analyse mobilise.

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Mucem
Don Quichotte et la
complexité

Conférence de Françoise Gaillard, philosophe et historienne des idées.

Dans une fiction au titre aussi provocateur qu’intrigant « Pierre Ménard auteur du Quichotte », Borges met en scène un poétaillon symboliste du début du XXème siècle qui consacra l’essentiel de sa vie littéraire à écrire « Don Quichotte ». Entendons bien : à l’écrire, pas à le recopier ou à le plagier ; pas non plus à écrire un « Quichotte » contemporain. Pierre Ménard n’a que mépris pour ces ouvrages « parasitaires qui situent Hamlet sur la Canebière ou Don Quichotte à Wall Street ». À partir de cette « entreprise a priori impossible » cette fable permet de poser au phénomène de la création ou de l’invention, la question de la méthode et d’exposer la complexité des causes que son analyse mobilise.

vendredi 17 octobre : 18h

COMPLET

Muséum d’Histoire naturelle
La mort c'est la vie

Conférence de Boris Cyrulnik, neuropsychiatre, directeur d’enseignement du diplôme universitaire d’éthologie humaine de l’université de Toulon.

Si nous étions immortels, l'espèce entière vieillirait et, à la moindre variation du milieu elle serait éliminée, c'est ce qui est arrivé à 95% des espèces vivant à l'origine de la vie sur la planète. Si la mort n'existait pas nous ne pourrions pas donner sens à la vie car nous n'aurions plus la sensation d’événement, le hasard disparaitrait, tout vaudrait tout c'est à dire rien, c'est à dire pas de vie psychique. Le fait de la mort contraint au sens, l'angoisse de la mort contraint à la créativité, à l'imagination de ce qui ne peut pas être perçu, la métaphysique, dieu, l'art, l'histoire et les guerres que cette capacité humaine entraine. Sans la mort, pas de vie psychique ni culturelle. Avec la mort : pas facile mais passionnant.

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Muséum d’Histoire naturelle
Le transhumanisme : une religion pour notre époque?

Conférence de Stanislas Deprez, philosophe. Suivi d’un échange avec Julie Beauté, philosophe.

Le transhumanisme est un mouvement qui entend décrire et prescrire l’humain de demain : grâce à la technique, nous serons augmentés, hybridés à une intelligence artificielle générale et immortels (ou du moins a-mortels). Et ainsi, prêts à quitter le berceau qu’est notre Terre polluée pour partir à la conquête de l’univers. Certains transhumanistes vont jusqu’à dire que nous serons comme des dieux. Ce n’est pas qu’une boutade ou un slogan. Certes, le mouvement se présente généralement comme scientifique, matérialiste et athée. Pourtant, les ponts avec le religieux se multiplient : associations transhumanistes mormone, évangélique ou bouddhique, Terasem Movement Transreligion, Way of the Future Church, The Cosmic Order… En outre, les discours transhumanistes s’appuient sur des mythes existants (Gilgamesh, Icare) ou inventés (la fable du Dragon-tyran). Après tout, il n’y pas là de quoi s’étonner s’il est vrai, comme le pense l’anthropologue Maurice Godelier, qu’aucune société n’existe sans un imaginaire politico-religieux. Le transhumanisme serait-il une religion pour notre époque sécularisée ? Et que dit cet imaginaire techniciste de notre société en quête de bonheur et de liberté ?

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Muséum d’Histoire naturelle
Pourquoi meurt-on ?

Conférence d’Abdel Aouacheria, biologiste, chercheur au CNRS à l’Institut des Sciences de l’Evolution de Montpellier. Suivi d’un échange avec Julie Beauté, philosophe.

La mort est un thème qui, à défaut de nous réunir, nous concerne toutes et tous. Bien qu’elle transcende les clivages disciplinaires et qu’une littérature abondante lui ait été consacrée au fil du temps, force est de reconnaître qu’elle demeure essentiellement une énigme. Comment ne pas se perdre dans l’océan des aphorismes sur la mort ? Pire : comment les faire tenir ensemble ? Florilège : « la mort n'est rien pour nous » (Epicure), « la vie, c’est la mort » (Claude Bernard), « ce sont les organismes qui meurent, pas la vie » (Gilles Deleuze), « la vie est la somme totale des fonctions qui résistent à la mort » (Xavier Bichat), mot qu’Edgar Morin complètera par « en s’aidant en même temps de la mort ». La conférence explorera la face biologique de la question, en prenant en considération certains aspects évolutifs (de biologie de l’évolution) et philosophiques (de « métabiologie »). Alors que les mythes et les philosophies de la mort ont cherché à la justifier, à lui donner un sens, la biologie contemporaine est la seule discipline à avoir réussi le tour de force de pouvoir…l’expliquer. De la mort, il est aujourd’hui possible d’inférer les causes proximales (ses mécanismes, le comment) et les causes ultimes (ses fonctions, le pourquoi). L’histoire ne s’arrête pas là pour autant : alors que certains organismes (comme les saumons) meurent subitement après s’être reproduits, d’autres ont quant à eux réussi à la déjouer, que l’on pense à Pando (un arbre-forêt vieux de 80 000 ans), au tardigrade (qui survit dans l’espace), ou à la méduse immortelle. Mais les transhumanistes l’ont bien compris : pour nous autres humains, la nature est mal faite et il revient aux technosciences de nourrir la seule quête vouée à ne jamais s’éteindre : celle de l’immortalité.

vendredi 17 octobre : 18h30

Rooftop de Grand Central - Journal La Provence
Hypnocratie. Comment la guerre de la perception redéfinit le vrai

Andrea Colamedici et Maura Gancitano, philosophes et écrivains italiens, fondateurs de la maison d’édition et fabrique culturelle Tlon.

Dans un monde où les faits cèdent la place aux récits viraux, Hypnocratie explore les mécanismes de manipulation douce qui façonnent nos croyances. Écrit sous le nom fictif de Jianwei Xun par le philosophe Andrea Colamedici, ce livre-enquête mêle critique des technologies de l'attention, réflexion sur la post-vérité et stratégie éditoriale performative. Le projet, qui a dupé presse et lecteurs avant d’être révélé comme une opération artistique, interroge les frontières entre fiction, propagande et vérité. Un cas d’étude philosophique sur notre époque hypnotique.

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Rooftop de Grand Central - Journal La Provence
« Qu’est-ce que l’IA soustractive ? »
L’intelligence artificielle au service de l’aide financière à la création artistique

en partenariat avec La Provence

Sur une proposition de Jacques Serrano, directeur de la Semaine de la Pop Philosophie, présentée par Julian Salaün et Valérie Vincent Genod, de la start-up Serendyme.

Pensée par Jacques Serrano, l’IA dite « soustractive » se distingue des usages devenus communs de l’intelligence artificielle, génératrice d’images et de textes. Dans une perspective expérimentale, elle pourrait exister comme une aide aux décisions de financement de projets artistiques et culturels, à destination d’organismes confrontés à un manque de moyens humains ou financiers. Une telle IA reposerait sur un mécanisme d’évaluation des projets de création artistique s'appuyant sur une métrique unique : l'écart par rapport à l'existant historique dans le champ artistique et intellectuel, tel qu’il peut être mesuré par l'intelligence artificielle. Ce dispositif d’assistance par IA permettrait de neutraliser la subjectivité du goût esthétique ainsi que certains biais cognitifs, idéologiques ou relationnels, qui influencent bien souvent les décisions des commissions de financement. Une telle application de l’IA est-elle possible ou même souhaitable ? Julian Salaün, cofondateur et responsable de l’innovation de la startup Serendyme se prête au défi de répondre cette proposition conceptuelle en articulant une vue critique et prospective sur les vertus et limites des IA, basée sur son expérience de designers de services d’IA qui n’aplanissent pas la complexité mais aident à la travailler au contact des émotions humaines.

samedi 18 octobre : 14h30

[mac] musée d’art contemporain de Marseille
Des possibilités d’un métissage dans les arts plastiques

Conférence d’Alexis Nuselovici (Nouss), professeur émérite de littérature générale et comparée à l'Université d'Aix-Marseille.

Le métissage est épistémologiquement reconnu en anthropologie, sociologie et histoire. Si son usage est plus rare dans le domaine esthétique, il apparaît en musique grâce au rythme qui favorise les croisements entre les gammes et en littérature grâce au travail des langues et de la traduction, Les arts plastiques ne devraient pourtant pas l’ignorer car, depuis la modernité, le métissage est susceptible de livrer une grille interprétative pertinente. Il éclaire en effet les manières dont les formes peuvent abandonner l’exigence de l’harmonie pour s’ouvrir aux désordres du fragmentaire et de l’hétérogène. Afin d’éclairer ces enjeux, la présente conférence convoquera certains notions philosophiques (altérité, différence ou négativité) tout en interrogeant quelques œuvres (Mark Rothko, Frida Kahlo ou Alfredo Lam).

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[mac] musée d’art contemporain de Marseille
Le mot de la fin à... 

Alain Damasio, écrivain,  en conversation avec Mathieu Garling.

L'auteur de La zone du dehors (1999), La Horde du Contrevent (2006), et Les Furtifs (2019) viendra réfléchir avec nous sur l'impact des imaginaires de science-fiction dans le monde contemporain. Comme Edgar Morin en 1969, qui y avait écrit son Journal de Californie, Alain Damasio s'est rendu dans la baie de San Francisco pour observer et témoigner des mutations qui s'y déroulent. Son dernier livre, Vallée du silicium (2024), prend ainsi la forme d'un journal de bord rédigé à l'occasion d'un séjour dans la Silicon Valley. Damasio y consigne ses réflexions sur notre fascination pour le pouvoir des technologies et se positionne en faveur d'un art de vivre avec les technologies. Autant de thèmes sur lesquels il reviendra à l'occasion d'une conversation pop philosophique avec Mathieu Garling, en clôture de notre 17e édition Eloge de la complexité, face au simplisme et au populisme.

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